mardi 18 mars 2014

Théâtre de marionnettes | Un beau matin, Aladin 

D’après les contes des Mille et une nuits
Mise en scène de Matèj Forman


Dans l'univers de Matèj Forman, le spectacle ne débute pas quand le public est plongé dans le noir et que s'éclaire la scène. Le passage d'un temps à un autre est plus trouble, plus subtil. Au bout de longues perches, des boules laissent filtrer des raies de lumière. Elles viennent de tous points : salle, plateau. S'échappent de ces encensoirs des volutes de fumée qui déjà convoquent l'Orient. À l'avant scène, une arche pose le cadre du récit. Place au conte.
Un beau matin, Aladin, programmé à la MC2 de Grenoble jusqu'au samedi 22 mars, puise à la source du conte : l'Orient des Mille et une nuits. Aladin retrouve ici son récit fondateur, celui qui l'encadre, l'histoire de Shéhérazade. C'est grâce à son art du récit que la jeune princesse sauve sa vie. Par peur d'être trompé, le Sultan fait exécuter toutes ses épouses au lendemain de la nuit de noce, jusqu'à ce qu'il épouse Shéhérazade. Le rite barbare est alors suspendu comme l'est le Sultan aux récits de la jeune femme qui, chaque nuit, narre une nouvelle histoire. L'aube venue, elle l'interrompt et prolonge ainsi le fil de sa vie. Qui mieux que Matèj Forman pouvait s'emparer du conte qui célèbre le mieux le pouvoir du récit ?

« Est-ce que c'est un morceau de bois mort ou est-ce qu'il peut faire partie d'une histoire ? », demande la récitante (Agnès Sourdillon) en désignant la marionnette qui figure Aladin. Dans cette fantaisie orientale, non seulement les marionnettes, pourtant manipulées à vue, s'intègrent à l'histoire mais elles portent les émotions des jeunes héros : Aladin et la fille du Sultan dont il est fou d'amour. Autour d'eux crépitent les trouvailles scéniques – jeux d'ombres et de lumières, objets nés d'une inventivité foisonnante – et se constitue un Orient de rêve. Caravane de dromadaires, voilures chamarrées, étoffes miroitantes, génie sombre et masqué de la lampe...
Et comme le Sultan gagné par le plaisir du récit fabuleux, le public se prend à espérer que l'aube oublie de chasser la nuit.

A.D.

© Irena Vodakova
Compte rendu critique du spectacle
vu le 18/03/2014

MC2: Grenoble



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